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  • adeuxpourdieu

Semaine 4 : A la croisée des chemins

Itinéraire : Ambérieu en Bugey - Challes les eaux (100 km)

 

Dernières profondes inspirations loin des montagnes, puis c'est l'heure de quitter le plancher des vaches (Dieu sait que l'Ain chérit ses bovins), goûter l'air frais et vivifiant de Savoie et les premiers dénivelés ! La traversée du Rhône sépare les deux ambiances : dans leur dos on sème bientôt le maïs, tandis que de l'autre côté les sommets enneigés annoncent un Carême très aérien. Heureusement, nos deux amies sont en bonne compagnie pour pénétrer ces territoires mystérieux...

 

Balance man... Cadence man... Trace la glace rasta !

Eh oui, nos deux marcheuses s'évertuent à monter la cadence, malgré les pentes amicales qui pointent à l'horizon. Pour l'instant il s'agit simplement de remonter le cours du Rhône par la rive nordique jusqu'à Lhuis. Là, sur les contreforts de la montagne de Tentanet commenceront les hostilités. Il faudra traverser cette dernière et redescendre par le versant-est à Belley, d'où le regard plonge vers le lac du Bourget. Le plus dûr alors dépassé, il ne reste qu'à s'acheminer vers Chambéry et trouver un foyer où fêter l'anniversaire de Faustine bien au chaud !


Les premiers jours sont marqués par un temps nuageux : cause ou conséquence, les filles ont décidé de chanter. Et pas n'importe comment : en canon, sur un air enseigné par un hôte. Visiblement, le défi de concentration est de taille -"ne pas quitter ma voix, ne pas quitter ma voix..."- et occupe plus d'une pause. A ce jour, ce refrain demeure le meilleur remède pour oublier la fatigue de fin de journée, particulièrement sensible dans les grandes descentes où les chevilles et genoux accusent le coup...


Viennent ensuite les jours splendides : à partir de la mi-semaine (dès Lagnieu) le soleil se rélève et les survêtements techniques tombent. A la joie de marcher plus légères s'ajoutent les rencontres merveilleuses : les paroissiens des environs sont extrêmement chaleureux et une foule de petites intentions revigorent les filles. Par exemple, la messe des Cendres locale est célébrée trop loin pour qu'elles l'atteignent : l'un propose de les emmener en voiture ! Un autre, Jean-Yves, les accueille ensuite au déjeuner et leur donne le contact d'un ami proche de Chambéry...


Quelque chose a peut-être également changé en elles : après un mois de marche, c'est nettement plus facile de surpasser sa timidité et discuter avec de complets inconnus sur le chemin, découvrir leur pays, parler simplement. Un trait caractériel rarement cultivé dans la nouvelle Lutèce et donc une petite transformation pour les filles qui trouvent leur joie dans ces rencontres plus spontanées !

 

Un pélerin russe et de courageux Belleysans


La frontière savoyarde et les petits chemins de campagne sont parsemés de calvaires et croix aux carrefours dont le rôle symbolique rappelle le choix radical à faire au pied de la Croix. Le monument, très souvent orienté, s'avère aussi utile pour l'orientation lorsque les chemins sont complètement enneigés ! Mais est-ce encore nécessaire en la compagnie d'authentiques connaisseurs des lieux ?


Rencontrés lors d'un déjeuner aux abords de Belley, une famille se propose de les accompagner deux journées consécutives : le premier jour, le fils (Théophane) entre en Savoie aux côtés des marcheuses après 10km de marche, puis le lendemain c'est la famille au complet qui conduit les pèlerines jusqu'au lac du Bourget. Quel chic périple sous un soleil généreux et au petit vent frais !


Un autre compagnon les accompagne toute la semaine : il ne comprend pas l'injonction de saint Paul (1 Th 5,17) : "Priez sans cesse". Du coup, il marche et interroge ses rencontres, suivant le commentaire de st Augustin : "Peut-il le dire parce que, sans relâche, nous fléchissons le genou, nous prosternons notre corps, ou nous élevons les mains ? Si nous disons que c'est là notre prière, je ne crois pas que nous puissions le faire sans relâche ?". Vous l'aurez peut-être deviné : les filles sont tombées sur un exemplaire des "Récits d'un pélerin russe". Plus dense que le dernier roman historique. On évite de le feuilleter dans les montées celui-là...

 

A chaque jour suffit sa peine

Les filles s'échouent de l'autre côté du lac, comme prévu, à Chambéry. Là, inutile de dire que la marche s'accélère. D'une part car il faut avancer au rythme du canon entêtant. Aussi car l'arrivée marque les retrouvailles avec plusieurs amis et parents venus les retrouver pour l'anniversaire de Faus' !


Il faut croire que la Providence n'a pas oublié cette occasion très spéciale : le contact offert par Jean-Yves se révèle être aussi un ancien pèlerin (Châlles-les-eaux => St Jacques de Compostelle, aller retour) ET le propriétaire du château des comtes de Challes ! Ce dernier a rénové ces vieux murs du XVe siècle en ouvrant une partie à l'hôtellerie. Et les deux marcheuses y sont conviées pour le déjeuner ! Grandes discussions sur ces aventures partagées avec Gérard (qui a écrit un livre au retour de ses 4000km) et visite des lieux. Puis, c'est le moment de se rendre à l'évidence : la surprise que les parents prévoyaient d'offrir aux filles pour l'anniversaire...était une nuit dans cet hôtel. La famille a bien ri en apprenant la nouvelle...Devancée de manière si flagrante par les anges gardiens. C'est de la triche.

Le réconfort est toutefois doublé en ouvrant les valises : un pyjama pour la nuit, des habits "normaux" pour le lendemain et des Balistos ! Il faut ce qu'il faut.


"Je ne crois pas qu'il y ait de bonnes ou de mauvaises situations...". Vous connaissez la suite? Par coeur ? Respect... Ça c'est l'option gauloise, légère et bonhomme, qui a tout de même forgé une nation de joyeux penseurs intrépides. Nos deux marcheuses vous proposent un autre passage qui guide toute leur aventure et résume plutôt bien cette fin de semaine.

La scène se passe également en Orient, et cette fois le scribe écoute un homme répondre à ses questions. Comme Astérix, le scribe doit être un peu sonné : juste avant ce court passage, il vient d'entendre : "Là où est ton trésor, là est ton coeur [...] Nous ne pouvez servir à la fois Dieu et l'Argent". La suite éclaire et nourrit certainement un pèlerinage jusqu'à Jérusalem :


"Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n’amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Vous-mêmes, ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? Qui d’entre vous, en se faisant du souci, peut ajouter une coudée à la longueur de sa vie ?


Et au sujet des vêtements, pourquoi se faire tant de souci ? Observez comment poussent les lis des champs : ils ne travaillent pas, ils ne filent pas. Or je vous dis que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’était pas habillé comme l’un d’entre eux. Si Dieu donne un tel vêtement à l’herbe des champs, qui est là aujourd’hui, et qui demain sera jetée au feu, ne fera-t-il pas bien davantage pour vous, hommes de peu de foi ?


Ne vous faites donc pas tant de souci ; ne dites pas : “Qu’allons-nous manger ?” ou bien : “Qu’allons-nous boire ?” ou encore : “Avec quoi nous habiller ?”. Tout cela, les païens le recherchent. Mais votre Père céleste sait que vous en avez besoin. Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît. Ne vous faites pas de souci pour demain : demain aura souci de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine."


Ultime cadeau de cette semaine : Théophane, l'ami marcheur belleysan, leur envoie la partition de leur chant en canon. Si vous voulez l'apprendre en synchronie, ecce cantus :

A très vite !

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